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  • Photo du rédacteurParis d'Exil

TÉMOIGNAGE


À la préfecture

Une personne de Paris d’Exil, qui accompagne régulièrement des personnes à la préfecture, témoigne sur les violences banalisées que l’on rencontre là (cette fois boulevard Ney, un matin) :

« Arrivée à 7h du matin, il y a déjà des dizaines de personnes qui font la queue devant l'entrée. Les premiers sont là depuis 5h, ou ont même passé la nuit devant la préfecture. Nous attendons donc avec les autres dans cette file d'attente qui ne cesse de croître. Il fait froid, il y a des familles, des enfants qui attendent avec nous.

Un peu avant 9h, la Préfecture ouvre enfin ses portes. Les premiers ont donc passé, au minimum, près de 4h à attendre, debout, dehors, devant la préfecture. Nous passons un à un le contrôle de sécurité.

A l'entrée du sas, une affiche précise que conformément à la loi Toubon à la préfecture on parle français, et que les personnes qui se présentent n'ont qu'à venir avec un traducteur... On est quand même au service ASILE de la préfecture, qui ne reçoit donc que des étrangers. Mais le préfet estime que les demandeurs d'asile ont les moyens de se payer les services d'un traducteur pour leurs rendez-vous...

Une fois entrés il faut de nouveau faire la queue pour passer au guichet de pré-acceuil. Dire que l'agent de pré-accueil que nous avons vu ce jour là était tout sauf accueillant est un euphémisme...

Des scènes halluciantes se succèdent devant nos yeux : Une personne se présente à l'accueil avec un document du commissariat. L'agent de la préfecture ne comprend pas ce qu'elle veut, et ne veut pas chercher à comprendre. On préfère le refouler en lui hurlant littéralement dessus: «C'EST QUOI CA ENCORE ?! NON MAIS C'EST PAS ICI, ALLEZ C'EST BON LA PARTEZ ! », Le monsieur insiste pour qu'elle regarde ses papiers.. « NON MAIS C'EST PAS LE COMMISARIAT ICI MONSIEUR, C'EST LA PREFECTURE ! C'EST PAS ICI, LA PARTEZ MAINTENANT !! MAIS PARTEZ JE VOUS DIT ! C'EST PAS POSSIBLE IL COMPREND RIEN ! IL ME SOULE LUI»

La personne insiste et essaye de lui faire comprendre la situation. Elle a visiblement perdu son attestation de demande d'asile et vient avec une déclaration de perte de la police, qu'il doit remettre à la préfecture pour qu'elle lui en délivre un nouveau. Rien de difficile à comprendre... mais l'agent d'accueil ne veut rien entendre, continu de crier, de plus en plus fort, et lui balance ses papiers à la figure. La tension monte, d'autres agents finissent par intervenir, on lui dit finalement qu'il n'a qu'à revenir demain...

On refoule ainsi des personnes qui ont fait la queue pendant des heures, sans une once de décence et de civilité : « Non mais là il y a plus de places, donc revenez demain ! Allez allez je vous dit de partir là ! », en écartant violemment leurs papiers du bureau. Il en faut du sang froid et du courage pour supporter une telle violence institutionnelle ! Mais les demandeurs d'asile n'ont pas d'autres choix que de se débrouiller face à des institutions qui ne daignent les respecter et les écouter... Et qui les mettent dans des situations absurdes et invivables !

Nous discutons avec une personne qui dort dehors et s'est fait voler ses affaires, dont ses papiers. Il est donc allé à la préfecture, qui l'a envoyé au commissariat, qui l'a envoyé à France Terre d'Asile, qui l'a renvoyé au commissariat, qui l'a renvoyé vers la préfecture... Ou il se fait lui aussi hurler dessus, car « il n'a rien à faire là ». Lorsque nous décidons d'intervenir, le ton de l'agent d'accueil change radicalement. Calmement ce dernier accepte d'écouter la situation de la personne, tente d'évaluer ce qu'il est possible de faire. Conclusions : Mieux vaut être blanc et français lorsqu'on a quelque chose à demander à la préfecture.

Avec ceux qui ne se sont pas fait refoulés à l'accueil, nous patientons donc. Nous patientons encore et encore... Un rendez-vous à la préfecture est souvent synonyme d'une journée entière à la préfecture. La salle d'attente est bondée, il n'y a pas assez de chaises pour tout le monde. Certains attendent par terre, d'autres debout, mais ils se font réprimandés car ils gênent la file d'attente réservée à l'accueil. Les gens discutent pour faire passer le temps... Mais à plusieurs reprises on leur demande de ne pas faire de bruit. Il faut se faire petit, ne pas gêner les agents, attendre en silence.

Et le pire dans tout ça, c'est que beaucoup attendent ainsi des heures et des heures... pour se retrouver dubliné/ redubliné/ avec un arrêté de Transfert à la fin de la journée. Autrement dit, ils sont contraints d'attendre (dans des conditions difficilement supportables) que la préfecture les mette dans la merde. Mais pas le choix, impossible d'échapper à ça...Irrespect total, violence verbale, acharnement à pourrir la vie des gens, maltraitance institutionnelle...

BIENVENUE A LA PREFECTURE ! »


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