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  • Photo du rédacteurParis d'Exil

Retour sur l'action du collectif Réquisitions à République


En cette "Nuit de la solidarité" organisée par la Mairie de Paris, le collectif Réquisitions a décidé de visibiliser les personnes toujours à la rue. Elles sont toujours des centaines. D'autres sont hébergées par des particuliers, dans des hôtels que les associations peuvent payer en urgence mais pas de manière pérenne, dans des lieux insalubres et/ou instables. Ce soir environ 400 personnes, sans abri, mal logées, exilées, sans-papiers, familles, hommes, femmes, enfants… sont présentes pour se mobiliser et demander le respect d'un de leur droit fondamentaux : avoir un logement.


À 18h30 le camion arrive, tout le monde s'y met pour décharger et mettre les tentes en place. En moins de 5 minutes la moitié de la place de la République est transformé en un campement propre et plutôt bien aligné. Au moins une centaine de soutiens sont présent·e·s. La statue est ornée de la banderole du collectif Réquisitions. En cette nuit de la solidarité nous participons à rendre visible la situation des personnes présentes et demander des actions au gouvernement.


La police arrive après une trentaine de minutes. Nous savons grâce à d'autres associations que beaucoup de places sont disponibles dans des centres et hôtels sociaux (la première étape vers un hébergement stable ou un logement). Les policiers repartent et nous ne les reverrons plus. L'UASA et FTDA sont présent·e·s, ils observent en retrait, attendant certainement de savoir comment va s'organiser l'évacuation. Nous avons demandé il y a plusieurs semaines aux pouvoirs publics de nous indiquer un lieu où nous pourrions diriger les personnes que nous croisons en maraude. La réponse : le 115. Pour toute personne ayant déjà essayé d'appeler c'est une réponse au mieux ironique… (Surtout lorsqu'il s'agit du SIAO du 93).


Au cours de la soirée le préfet publie un communiqué assassin, nous accusant d'être "irresponsables" (comme si le fait qu'il laisse des personnes dormir à la rue ne l'est pas plus), on aurait monté un campement "sauvage" (…) et "il y a des places". Justement ces places là nous n'arrivons pas à y avoir accès, alors s'il faut faire une action pour que des gens puissent être à l'abri de la rue, de la violence, de la répression policière, on le fait.


La solution on la connait et on lui propose depuis plusieurs mois : appliquer la loi de réquisition. L'État a à sa disposition cet outil. Réquisitionner des bâtiments vides, qui lui appartiennent à lui ou à une personne morale (banque, fond de spéculation…). Ainsi chacun·e (sans abri, sans logis, mal logé·e) pourrait avoir un appartement à soi, digne, stable, pérenne…


Après la distribution de repas les personnes se regroupent autour de la Fanfare Invisible, les enfants jouent, c'est le printemps et le temps est presque doux. À 22h nous ne savons toujours pas à qui envoyer les listes (et nous aimerions arrêter d'en faire, tout le monde a le droit à être hébergé et n'est-ce pas pour ça qu'existe la "Nuit de la solidarité" ?) Alors que nous pensions que tout le monde serait hébergé, les décideurs (à plusieurs niveaux) commencent à nous refroidir. Les familles oui mais les hommes seuls pas sûr. Sauf que ça ne fonctionne pas comme ça, on ne laisse pas partir une partie des personnes et demandons au reste de dormir sur place. C'est le jeu (malheureusement habituel) qui se met en place, chacun·e campant sur ses positions, les pouvoirs publics annonçant moins de place que de personnes présentes pour nous rappeler qui décide, qui a le pouvoir. Un jeu de rôle malsain et infect, parce qu'en face c'est toujours les mêmes qui le subissent.


Il faut attendre et tenir. On sait que les places sont libres, que les pouvoirs publics ne veulent pas nous laisser crier victoire, préfèrent nous fatiguer toutes et tous pour nous remettre à notre place. Les pions que nous sommes prenons notre mal en patience. On a l'habitude de ces négociations. En face on nous explique que nous sommes horribles de prendre le risque de laisser dormir les familles ici, "avec des enfants en plus". Où pensent-iels qu'ils et elles dorment habituellement ? Quand iels les renvoient vers le 115 qu'est-ce qu'iels croient ?

On nous fait comprendre que par notre faute des personnes vont dormir dehors cette nuit car tout le dispositif de la "Nuit de la solidarité" est occupé par nous. Entretemps des personnes arrivent ayant entendu parler de ce qu'il se passe à République et de la possibilité d'obtenir un hébergement ici. Finalement on demandait un lieu pour orienter les gens que nous croisons vers des hébergements, c'est chose faite, et il semblerait que nous sommes finalement d'une grande aide pour cette "Nuit de la solidarité".


Pas de tri, pas de listes, pas de compromis. Tout le monde a le droit à un hébergement !


Vers minuit les premiers bus arrivent pour les familles, puis lentement les bus du recueil social viennent emmener les hommes vers un centre, enfin un bus pour les mineur·e·s et les quelques couples et familles arrivé·e·s entretemps aux alentours d'1h30. À 2h du matin les derniers hommes montent dans leur bus. Tout le monde applaudi, soulagé. C'est bon, ce soir 480 personnes, au moins, vont dormir à l'abri !


Sans la police pour faire monter la tension tout s'est passé dans le calme, l'évacuation s'est ensuite déroulée, lentement, en repliant les tentes et nettoyant la place.


Tant qu'il y aura des gens à la rue, on continue ! Et nous n'accepterons aucune remise à la rue, l'hébergement d'urgence est inconditionnel et dans la continuité ! Tant que la loi de réquisition ne sera pas appliquée pour faire face à la crise du logement, on continue !

 

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