Le dispositif Prahda
(Programme d’Accueil et d’Hébergement des Demandeurs d’Asile), créé par le ministère de l’Intérieur, a été lancé en 2016, après un appel d’offre demandant 5351 places d’hébergement d’urgence, remporté par Adoma. 62 hôtels, principalement d’anciens F1, ont été transformés en centre par l’organisme. Ce dispositif pose de nombreux problèmes. Initialement prévu pour accueillir des personnes dublinées, il accueille finalement tou.te.s les demandeur.se.s d’asile et des réfugié.e.s statutaires, les centres d’hébergements étant saturés (par une volonté délibérée de ne pas proposer de dispositif de prise en charge, alors qu'environ 20% du parc immobilier français reste vacant)...
Les demandeur.se.s d’asile dublinés sont “trié.e.s” dans les Cao, avant d’être dirigés vers ces Prahda. Puis ils sont rapidement convoqués, reçoivent un billet d’avion et sont généralement assignés à résidence. Les recours sont difficiles à lancer dans les délais, et systématiquement rejetés. Pour certain.ne.s, la procédure Dublin arrivait à son terme ?. C’est l’angoisse de l’expulsion, et si la personne a déjà été déboutée de sa demande d'asile dans le pays où elle est renvoyée, ça signifie un retour à son pays d’origine, avec tous les dangers que cela implique. Pour les personnes en procédure normale ou accélérée, cela signifie aussi un manque d’accès aux soutiens juridiques et administratifs et cela impacte directement la constitution de leur dossier et leur chance d’obtenir l’asile.
Les lieux ont souvent été investis avant que les travaux censés les rendre conformes et adaptés à l’accueil ne soient réalisés. Dans certains d’entre eux il n’y a pas de cuisine à proprement parler, pas de laverie, pas d’accès à internet, pas de livret d’accueil traduit dans toutes les langues, l’hygiène n’y est pas respectée… Installés souvent loin des centres-villes, commerces et lieux d’activités, le long de grands axes routiers, sans transports, ils renforcent l’isolement, éloignés des associations et collectifs, ne permettant pas un bon accompagnement juridique et administratif, ne garantissant pas l’accès au droit et aux soins. Parce que ce sont des centres “low-costs”, le budget y est réduit, pâtissant d’un manque de personnel et surtout d’intervenants sociaux (environ un pour cinquante demandeur.se.s d’asile). Comme dans les CADA, une caution est demandée aux hébergé.e.s, allant de 15 à 20€ par mois, renouvelable 10 mois. Obligatoire dans les CADA elle est a priori optionnelle pour les Prahda. Mais des personnes refusant de la payer se sont fait menacer d’expulsion (signifiant une rupture avec l’Ofii, donc la fin de l’hébergement et des aides). Au Prahda de Quimper, signalé de nombreuses fois par des associations pour son accueil déplorable toutes les familles avec enfants vont être dirigées vers d’autres solutions d’hébergement.
L’isolement, l’ennui, l’angoisse, les transferts incessants entre les centres (qui empêchent tout suivi sérieux et rendent parfois impossible de recevoir son courrier), rendent les hébergé.e.s toujours plus vulnérables. Pour les dubliné.e.s, ces centres sont des salles d’attentes de l’expulsion, des centres de rétention déguisés par une “semi-liberté” illusoire (et infirmée par les assignations à résidence).